mardi 20 décembre 2016

Miss Organisation


Je sais, j'ai encore l'air d'être désorganisée, mais quand je regarde en arrière, je réalise tout le chemin parcouru. En fait, on pourrait maintenant m'appeler Miss Organisation.

En effet, quand je reçois du courrier, je m'empresse de le placer au bon endroit. Je jette le vieux et le remplace par le nouveau. Je paie immédiatement mes comptes. Je signe tous les formulaires (et Dieu sait qu'il y en a lorsqu'on est parent d'un enfant d'âge scolaire ! Signe pour tel travail, pour telle évaluation, pour telle permission de sortie, pour la participation à tel événement, pour qu'il puisse respirer, péter, se gratter, s'habiller... ça ne finit plus!) Je fais des piles pour les vêtements qui ne font plus : une pour la friperie et une autre pour la poubelle.

J'inscris au calendrier et un peu partout dans la maison les multiples rendez-vous que mon rôle de parent amène (médecin, dentiste, psychologue, coiffeuse, parent-prof, vaccination... ) en plus des miens : médecin, dentiste, coiffeuse, garage-entretien, garage-réparations, garage-pose de pneus, garage-achat (maudit que ça coûte cher, un char!), entrevue d'embauche, rendez-vous galants (quoique dans mon cas, c'est plutôt rare...), psychologue/travailleur social/thérapeute/psychothérapeute/psychanalyste (appelez-le comme vous voulez, bref, il faut bien ventiler), sans compter les nombreuses choses à faire : épicerie, achat de vêtements, d'articles scolaires, de médicaments, spectacle de musique de Will, passer du temps avec Will, finir mon livre, retour de livre, avancer mon blogue, apprendre mon anglais, transferts, paiements de factures et dépôts bancaires... Je note absolument tout !

Je pars 30 minutes d'avance pour être sûre d'arriver à l'heure à mes rendez-vous (parce que je sais qu'en chemin, je vais me pencher pour ramasser toutes les choses qui traînent et que je vois du coin de l'œil, que je vais arrêter dans le miroir pour me recoiffer ou me remaquiller ou aux toilettes pour la énième fois (je ne sais pas pourquoi j'y vais quand je viens d'y aller mais bon, c'est peut-être un signe d'Alzheimer...).

Je jette les choses au fur et à mesure : reçus, papiers de bonbon, mouchoirs, brouillons, courriels (surtout ceux qui viennent d'Afrique et qui m'annoncent qu'une vieille tante vient de me léguer 1 000 000 $ même si je n'ai AUCUNE vieille tante qui vit en Afrique) indésirables. Je m'abonne le moins possible aux publications car quand je commence ça, je suis ensuite bombardée d'une tonne de pubs : sites de rencontres, Viagra (même si je n'en ai pas besoin. Premièrement, je ne suis pas un homme, comme vous devez vous en douter, et deuxièmement, c'est la calme plat de ce côté-là), Nasonex, vêtements, abris d'auto, antiseptiques, organismes de charité, sirops, vestons pour hommes (ils doivent me prendre pour l'autre sexe), placements bancaires, articles de cuisine (même si je ne cuisine jamais. Non, moi, je ne jure que par le préparé d'avance même si ce n'est pas bon pour la santé mais j'essaie de m'améliorer), échantillons de dentifrices, de parfums (même si je ne me parfume jamais, je préfère la fragrance Senteur Naturelle)...

Et j'ai pour règle d'or de TOUJOURS, TOUJOURS, TOUJOURS mettre mes choses bien en vue à la même place à chaque jour. Si je ne suis pas cette règle, je suis FOUTUE.

Et mon nouveau mantra (je ne sais pas pourquoi je dis « nouveau » puisque je n'en ai jamais eu...) : CE QUE JE NE VOIS PAS N'EXISTE PAS.

lundi 19 décembre 2016

Mais où j'ai mis mon ticket ?!!!

Bien que je me sois beaucoup améliorée dans l'art de gérer la paperasse, j'ai encore du chemin à faire.

Prenez ce matin, par exemple.

Je vais à l'hôpital avec Will parce que sa toux n'arrête pas d'empirer, malgré les multiples antibiotiques, pompes et eaux salines que je lui injecte depuis 1 mois et demie. Je n'adhère pas à la théorie des médecins, comme quoi ce n'est qu'un vieux rhume qu'il traîne. Moi, dans ma tête, un rhume, ça dure deux semaines. Si ça traîne, c'est parce qu'il y a anguille sous roche. Et ce matin, je suis vraiment déterminée à l'attraper, cette maudite anguille !

Je vais donc à l'hôpital avec sacoche, DS, jeux et bouteille d'eau, mes indispensables.

 Arrivée dans le stationnement, j'appuie sur le fameux bouton de la barrière, vous savez, celui qui est toujours trop loin pour notre bras trop court et qui nous oblige à sortir de la voiture pour réussir à appuyer dessus. Ce jour-là, la chance doit être de mon bord parce que je réussis à l'atteindre du premier coup. Youpi ! Je mets mon ticket dans le porte-bouteille et vais me stationner. Puis, je le fourre dans une poche de mon jeans et m'assure que j'ai mes indispensables (incluant Will, bien sûr!) avant de me diriger vers l'accueil.

Rendue dans l'entrée, j'apprends qu'en plus du traditionnel lavage des mains et du masque qu'il faut porter, il faut maintenant passer le dessous de nos bottes sur une machine nettoyante. La belle affaire! Moi et Will, on tente de garder notre équilibre tout en prenant la pose du pélican...

Ensuite, on entre dans l'hôpital et j'appuie sur un écran pour avoir mon billet de triage. On va s'asseoir et on enlève sacoche, tuques, manteaux, cache-cou, mitaines (ah ! les joies de l'hiver!), je sors le DS du sac et la bouteille d'eau de l'autre. Mais après seulement quelques secondes, on est appelé. Je ramasse en vitesse sacoche, tuques, manteaux, cache-cou, mitaines, DS et bouteille d'eau, les enfonce dans les manches des manteaux et on file vers la salle de triage. Le triage, c'est toujours rapide, que je dis à Will. C'est après que ça se corse... 

On n'a pas sitôt mis les pieds dans la salle que l'infirmière me demande notre billet et les cartes d'hôpital et d'assurance-maladie de Will. J'accroche nos manteaux sur le crochet de la porte, derrière moi, pose le sac à bouteille d'eau sur la table. Je sens son regard sur moi et me débats avec ma sacoche pour en extirper cartes et billet. Envoye! Grouille ! que je me dis à moi-même. La madame attend après toi ! Après plusieurs secondes de farfouillage, qui me semblent interminables, je les lui tends.

Puis, elle me demande ce qu'il se passe, prend la pression artérielle de Will, le fait monter sur une balance et lui insère un thermomètre dans le derrière. Il fait 38,2 de fièvre. (Moi, j'ai arrêté de la prendre parce que quand je le fais, le nombre affiché n'est jamais le même : 36,6, 37,1, 38,9, et de nouveau 36,6... C'est à devenir dingue ! Je ne dois pas avoir le tour...) Puis, elle me pose les sempiternelles questions: Depuis combien de temps votre fils a ces symptômes ? A-t-il des allergies? A-t-il déjà pris des pompes ? Y a-t-il certains médicaments qu'il ne peut pas tolérer? Très bien, allez vous inscrire et assoyez-vous dans la salle d'attente. 

Je ramasse mes affaires (j'en ai tellement que j'ai l'impression de transporter la maison au complet), on va au secrétariat pour s'inscrire et on va s'asseoir. J'empile ma sacoche et nos manteaux à côté de moi, ressors la bouteille d'eau et le DS et les tends à Will. Il les ouvre et se met à jouer. À ma grande surprise, le médecin nous appelle au bout de quelques minutes. Il faut dire qu'en ce lundi matin, il n'y a pas grand-monde... On remballe sacoche, DS, manteaux et bouteille d'eau. Direction : bureau du médecin.

On entre et je lui résume les six dernières semaines. Il écoute la respiration de Will au stéthoscope, examine sa bouche et ses oreilles et décide de lui faire passer une radiographie des poumons et des bronches. C'est pas trop tôt, que je pense. Il me tend une feuille bleue.

On va au département d'imagerie médicale, je leur remets la feuille et attends, Will pleurant à chaudes larmes à mes côtés. C'est que le médecin est allé un peu fort en examinant ses oreilles... Là encore, on ne nous fait pas attendre longtemps, ça doit être mon jour de chance, tout semble bien aller... Il passe sa radio et on va avertir la secrétaire. Elle nous dit de retourner nous asseoir.

Je remets ma sacoche, les manteaux et la bouteille d'eau à côté de moi, sors le DS et Will se re-remet à jouer. Puis, le médecin nous appelle encore une fois. On remballe sacoche, manteaux, DS et bouteille d'eau et on entre dans son bureau. Ses poumons sont beaux, mais il a une hypertrophie des végétaux. Traduction : va falloir lui enlever les amygdales. Il va communiquer avec un spécialiste et on devra attendre qu'il nous appelle... après les Fêtes. Il me donne une prescription et on ressort du bureau.

On retourne dans la salle d'attente, on s'habille et j'enfonce ma main dans la poche de mon jeans. Ouf, mon billet est encore là. On se dirige vers le bidule de paiement, j'insère mon billet : 4,75$. Je donne 20 $, prends le change, presse sur un bouton pour avoir mon reçu et le mets dans une poche de mon manteau. On va dans l'entrée et Will me dit qu'il faut se relaver les mains. Je lis le panneau : Veuillez vous laver les mains en arrivant et en quittant. Pour avoir l'air d'une bonne mère, j'obéis. Puis, on sort dans le stationnement, on va vers l'auto au pas de course (il doit bien faire - 30 dehors, vive le Québec !) et on s'y engouffre.

Je démarre, retourne vers la barrière et sors le billet que j'ai dans ma poche. Je l'insère. La barrière ne s'ouvre pas. Quoi ?! Mais qu'est-ce qu' il se passe !  Je le réinsère. Même chose. Évidemment, c'est à ce moment-là qu'une auto arrive derrière moi. Pour avoir la paix, je fais demi-tour et vais me stationner dans un coin.

- C'est le stationnement des médecins, fait remarquer Will.
- Je m'en fous.

C'est alors que je réalise que c'est mon reçu que j'avais tenté de faire entrer dans la fente de la machine à barrière.

- Mais où est-ce que j'ai mis mon maudit ticket ? Bon, je vais aller voir en-dedans. Bouge pas, je reviens tout de suite. 

J'entre à nouveau dans l'hôpital en évitant de regarder les gens (j'ai pas envie qu'ils me reconnaissent et qu'ils se demandent pourquoi je suis revenue) et me dirige vers la première employée que je vois, lunettes embuées.

- J'ai pas mon ticket pour sortir du stationnement. Qu'est-ce que je fais ?
- Allez voir l'agent de sécurité, qu'elle me répond avec un air bête.

Je fonce vers l'agent et lui explique ma situation. Il se retourne, prend un objet sur le bord de son bureau et me le tend. Un billet. Le mien.

- Oh, merci ! 

Un peu plus et je l'embrasse !

Je me rue vers la sortie, cours dans le stationnement (pourvu que l'auto ne se soit pas fait remorquer avec Will dedans ou qu'il ait décidé d'en sortir ou qu'un véhicule l'ait percuté!) et pousse un soupir de soulagement en voyant que mon auto est toujours là, intacte, et Will avec.

- Yeah ! Je l'ai ! que je crie d'un ton victorieux en embarquant et en brandissant le précieux objet devant Will. Il me regarde d'un drôle d'air, je démarre et me dirige vers la barrière.

J'insère mon ticket dans la fente et... bonheur des bonheur ! Elle s'ouvre !

dimanche 18 décembre 2016

Mon fils, Asperger de haut niveau ?

Mon fils a toujours été spécial, c'est certain. Mais de là à recevoir l'étiquette
« Asperger de haut niveau », il y a un monde.

C'est pourtant ce que la psychologue de son école pense.

Comme j'éprouvais des difficultés avec Will à la maison, j'avais décidé d'aller consulter. Après plusieurs mois, la psychologue scolaire me contacte enfin. Elle me dit qu'elle l'observera au cours des prochaines semaines. Puis, elle m'envoie un questionnaire de plusieurs pages que je dois remplir. Ce que je fais.

Quelques jours après l'avoir reçu, elle me donne rendez-vous pour en discuter. Je me rends à cette rencontre, anxieuse et curieuse à la fois.

Elle me demande de décrire les difficultés que je vis avec Will et me fait part de ses observations. Elle trouve que Will ne regarde pas assez les autres enfants. Qu'il ne manifeste pas d'émotions. Qu'il est toujours d'humeur égale. Que pendant que camarades s'excitent, lui, il ne réagit pas. Ne va pas vers eux. Ne leur parle pas.

Ensuite, elle me communique ses résultats aux tests d'aptitudes. Il est dans la moyenne pour tout, à part pour l'aspect verbal, où il est dans la moyenne supérieure. Elle trouve son raisonnement spécial, surtout en mathématiques. Sa motricité fine est plutôt mauvaise, ce qui est surprenant, vu ses capacités mentales élevées.

Je lui dis que Will peut regarder ou entendre quelque chose une fois et il l'enregistre pour toujours. Pas besoin de le lui répéter. C'est comme s'il prenait une photo dans sa tête. Qu'il savait jouer aux échecs à 4 ans. Qu'il s'attarde à des détails qui, pour moi, sont sans importance. Qu'il n'a qu'un intérêt : les jeux vidéo.

Et là, elle m'assène son verdict : mon fils serait Asperger de haut niveau. Mais pour en être sûr, il faudrait le faire évaluer en pédo-psychiatrie. Dans ce département, ils offrent aussi des ateliers d'habiletés sociales, qui seraient, selon elle, profitables à Will. Elle me demande mon consentement. J'accepte. Je ferais n'importe quoi pour lui.

Je lui demande d'où ça vient. Le Syndrome d'Asperger, je veux dire. Elle dit que ça proviendrait de plusieurs facteurs, dont l'hérédité et une bactérie dans les intestins. Les chercheurs ne le savent pas trop encore.

Mais je ressors de là ébranlée, sonnée. Je ne sais pas si je dois rire ou pleurer. Je ne m'attendais pas à ça. Et j'ai des doutes. Oui, Will est intelligent. Oui, il a du mal à gérer sa colère. Oui, ses intérêts sont restreints. Oui, il a des difficultés sociales. Mais ça vient peut-être de moi, tout ça. Parce que je lui ai parlé et raconté des histoires tôt. Parce que je suis souvent devant l'ordi. Parce que je suis sauvage et solitaire. Parce que je peux faire de grosses crises de colère. Parce que je m'ennuie facilement.

Oui, ça doit venir de moi. Surtout quand on sait que les attentionnels peuvent aussi avoir le syndrome d'Asperger...

samedi 17 décembre 2016

L'art de s'attirer les foudres



Comme je dis et fais des choses qu'il ne faut pas, il m'arrive souvent de m'attirer les foudres des gens. Ça me fait penser à la semaine dernière, lorsque je suis allée à la clinique médicale pour consulter un énième médecin pour mon fils qui n'arrête pas de tousser (ils disent qu'il n'a rien mais ça ne fait qu'empirer. Ils ont tu pris leur diplôme dans une boîte de céréales, cou donc ?! Bon, je m'égare...)

Donc, je vais à la clinique médicale pour la troisième fois en un mois... Comme je sais que l'attente est longue, je décide d'amener le Nintendo DS pour occuper Will. Après être allé à la réception, on va s'assoir dans la salle d'attente, qui est déjà bondée. Il est 8h45 (la clinique est supposée ouvrir à 8h30 mais ça l'air qu'ils ouvrent les portes à partir de 8h10...) Autour de nous, une mère et sa fille étendue de travers sur la chaise, des personnes âgées qui potinent et une mère qui essaie de contenir sa petite fille agitée qui coure dans la clinique et qui entre en coup de vent dans les bureaux des médecins... Quelques minutes après notre arrivée, je sors le DS et le tend à Will, qui le saisit aussitôt. Il l'ouvre et se met à jouer à Mario Bros (mais ne me demandez pas lequel...)

Quand il perd une partie, Will me tend l'objet, et je joue à mon tour (j'aime bien les jeux vidéo...) Après je ne sais combien de temps, Will décide d'ouvrir la caméra et de nous filmer. Je me prête au jeu, faisant des grimaces et des sourires.

C'est à ce moment-là que la petite fille agitée surgit devant nous. Elle prend les quelques chaises vides qui se sont libérées à la suite du départ de certains patients et les déplace un peu partout dans la salle d'attente... Sa mère est assise à côté et la laisse faire. Will trouve ça drôle et décide de la filmer. Il me la montre et éclate de rire. Je regarde l'écran et je souris. La petite fille entre dans le bureau d'un médecin, qui est situé juste en face de nous, et Will la suit avec sa caméra. Je lève les yeux et croise le regard de sa mère.

- Arrêtez de filmer, m'ordonne-t-elle. C'est un manque de savoir-vivre.

Will arrête sa caméra et je ne dis rien. À l'intérieur de moi, je fulmine : « Mais pour qui elle se prend, celle-là ?! C'est juste un enfant qui voulait passer le temps ! » Elle et moi, on se dévisage pendant plusieurs secondes, des éclairs dans les yeux.

- Non mais ça se peut tu, filmer les gens comme ça ! Il y en a qui ont vraiment pas d'allure !
- Ouin pis y'en a qui laissent leur enfant faire n'importe quoi ! que je renchéris. Aie ! Entrer dans les bureaux des médecins pis mettre toute la clinique à l'envers !
- Y en a qui sont vraiment malades ici ! Qui ne sont pas là pour s'amuser !

Je me dis en dedans de moi : « Qu'est-ce que vous pensez que votre fille faisait tantôt ? » Mais je ne dis rien parce que tous les regards sont braqués sur moi et que je n'ai pas envie qu'ils en rajoutent.

La petite fille se fait appeler par le médecin et sa mère et elle entrent dans son bureau. Lorsqu'ils en sortent, la mère se plante devant moi :

- J'aimerais que vous effaciez la vidéo. Ça ne se fait pas, filmer les gens. C'est un manque de savoir-vivre.
- Inquiétez-vous pas, que je lui rétorque. On n'a pas l'intention de mettre ça sur Facebook.

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Ça me fait penser à cette autre fois où j'étais allée au McDo avec Will. On avait fini de manger et il jouait dans les jeux. Anxieuse que je suis, j'étais montée dans le module pour voir comment ça se passait. Will était à l'intérieur d'un tuyau avec un petit garçon.

Sa maman arrive :

- Viens, on s'en va ! qu'elle lui dit.

Will bloque le passage du petit garçon.

- Sors de là, Will ! que je dis à mon fils.

Mais il ne bouge pas. Il se contente de me fixer en souriant.

- Allez, Will ! Le petit garçon veut sortir : laisse-le passer !

Il ne réagit toujours pas.

- Laisse-le passer ! dit la maman à mon fils. Il doit s'en aller.

Mais Will n'obéit pas.

Je fais un sourire moqueur à la mère. C'est ma façon d'évacuer mon malaise.

- Ça peut tu, être paresseux de même ! qu'elle lance.
- Vous êtes pas gênée de parler de mon fils comme ça !
- Je ne parlais pas du fils!

Elle entre alors dans le tunnel et tire son garçon par le bras.

Quand je repense à ces événements, je réalise que oui, j'aurais dû agir autrement. Mais ça l'air que j'ai l'art de m'attirer les foudres...


Avoir l'air d'une extraterrestre



Il m'arrive souvent d'être distraite au point d'avoir l'air d'une extraterrestre. Prenez l'autre jour, par exemple.

Comme à presque tous les matins où je suis pressée, ce matin-là, je cherche une mitaine (quand ce n'est pas ma tuque, mon foulard, mon sac à main, mes clés... bref, vous voyez le portrait). Farfouille ici, farfouille là, je sens la panique me gagner au fur et à mesure que le temps file et que je n'arrive pas à mettre la main sur le fameux objet. Je regarde entre deux barreaux d'escalier (où j'ai pris l'habitude de mettre mes choses), sur la tablette et le plancher de la garde-robe, dans les manches de mon manteau, sur le piano, les comptoirs, les tables et les fauteuils... rien. Pas de mitaine. En plus, je suis frileuse et il fait un froid sibérien. Ahhhhhhhh ! Tant pis, plus le temps de chercher, je sors dehors.

Je débarre les portes de l'auto, la fais démarrer, enlève la neige qui s'est accumulée dessus et démarre (peut-être pas dans cet ordre-là mais ça, c'est une autre histoire). Je vais porter Will à l'école et je me dirige vers mon resto préféré, où je prends un café en lisant le journal. C'est ma petite routine quotidienne et j'y tiens mordicus (je dois être Asperger sur les bords. D'ailleurs, les attentionnels peuvent aussi avoir le syndrome d'Asperger et les Asperger, le déficit de l'attention... Tiens, ça me fait penser... mais je m'égare. J'en parlerai dans un autre message)

En sortant de l'auto, je remarque que ma tête a une drôle de forme. Conique. Comme celle d'un extraterrestre. « Wow ! Qu'esssé ça ? » que je me demande. Je tâte le bout de ma tuque mais je n'y trouve rien d'anormal. Tant pis. J'entre dans le resto arrangée de même.

Je me dirige vers ma table habituelle, celle qui est séparée des autres par un panneau en verre (j'aime bien être au calme et à l'écart. Je l'avoue, je suis un peu sauvage). J'enlève une mitaine. Puis mon manteau. Et enfin, ma tuque. Quelque chose en tombe: mon autre mitaine ! Elle était restée coincée dans le fond depuis le matin, d'où ma tête en forme de cône !

Mais attendez : ce n'est pas fini.

Plus tard, cette journée-là, mon portable dans une main, je vais prendre un café au McDo. Je le commande, on me le donne et je cherche des yeux une table où m'assoir. J'en trouve une qui longe un mur dans un coin, au fond. Parfait, celle-là, c'est la mienne ! Je m'y dirige rapidement pour ne pas qu'on me la vole (je le sais, c'est puéril, mais bon), je m'assois.

Soudain, je sens quelque chose de dur sous mes fesses, dans mon pantalon. J'entre une main dedans et tâte. « Mais... ça ressemble à... un rouge à lèvres ! Qu'est-ce qu'un rouge à lèvres fait dans mon pantalon ?! » Je regarde autour de moi, pour vérifier que personne ne me regarde, et j'essaie de l'en extirper. Un homme assis devant moi m'observe d'une drôle de manière. J'arrête mon mouvement et attends qu'il regarde ailleurs. Le moment venu, je me dépêche de le sortir de là.

Je ne sais pas s'il y a des gens qui se sont rendu compte de toute l'affaire mais si oui, ils ont dû trouver que j'avais l'air d'une extraterrestre. Et avec raison. La preuve, le matin même, j'avais une tête en forme de cône !

samedi 20 février 2016

Tourner en rond chez l'orienteure


Pour une énième fois, je suis allée consulter une orienteure pour changer de domaine de travail. Il fallait bien : j'ai un enfant à faire vivre et rien n'a fonctionné. Je m'étais dit que cette fois, ce serait différent. Eh bien je m'étais trompée.

Comme je m'y attendais, elle m'a fait passer le fameux test RIASEC que j'ai fait un nombre incalculable de fois. Et comme à toutes les fois, il a donné la même chose, à la différence près que cette fois-ci, les lettres étaient inversées. Au lieu d'être AIZ (Artistique Investigateur Z Idéaliste), j'étais AZI. Grosse différence.

Et comme je m'y attendais aussi, l'ordinateur a généré un nombre impressionnant de métiers et  professions liés à mon profil : de caricaturiste à enseignant au primaire en passant par décorateur d'intérieur. Évidemment, rien là-dedans ne me branchait.

J'avais juste envie de lui demander : « Pourquoi me faîtes-vous encore passer ce maudit test ? À l'évidence, il ne vaut pas grand-chose puisque je suis encore chez l'orienteur ! » Mais bon, ça ne me tentait pas de me faire mettre à la porte : c'était mon dernier espoir.

Elle m'a dit :


- Tu vois, tu es une artiste.
- Merci, j'avais remarqué... mais c'est pas ça qui va mettre du beurre sur mon pain.
- Tu pourrais donner ton nom dans les journaux ?
- Ils sont tous en train de fermer...
- On aura toujours besoin de journalistes.
- Alors pourquoi perdent-ils leur emploi ?
- T'aimerais pas ça travailler dans une librairie ?
- Tu me vois encaisser les plaintes des clients ? Je les sortirais avec un gros coup de pied dans le cul, oui !
- Ou offrir tes services dans les commissions scolaires ?
- Pour travailler avec les enfants ? J'ai assez de misère à ne pas étriper le mien...
- Ou faire de l'infographie ?
- Un plan pour que je transforme une oeuvre en un torchon.
- Alors c'est quoi ton truc ?
- Je sais pas...
- Tu sais quoi ? J'ai l'impression que tu te sous-estimes.
- Ah ben oui, ça se peut, hein ? Quand on perd toutes ses jobs, il y a de quoi se sous-estimer... 
- Comme tu ne veux pas travailler avec les chiffres et les gens, tu pourrais travailler dans une ferme, un entrepôt, une usine, comme signaleure routière ou comme chauffeure de chariot élévateur ?
- J'ai tu une tête de chauffeure de chariot élévateur ?

Je commençais vraiment à perdre patience. Et mon temps. Et à réaliser que ce que je voulais vraiment faire, dans la vie, n'était pas offert dans les journaux et les sites d'emploi et n'était pas gage de sécurité ni de revenus. Mais de bonheur. Le bonheur de jouer avec les mots.


Ce que je fais déjà :)