dimanche 19 juillet 2009

On ne peut échapper à sa vocation

Il n'y a pas si longtemps, j'ai lu une phrase qui m'a marquée. Cela disait :

"Ne vous demandez pas ce que vous pouvez faire mais plutôt, ce que vous VOULEZ faire!"

J'ai donc pensé à tous les domaines dans lesquels j'excellais à l'école et où je pourrais peut-être mieux réussir que dans mon domaine actuel : sociologie, psychologie, travail social, éducation spécialisée, histoire de l'art... Je me suis alors demandé :

"Est-ce vraiment ce que je VEUX faire ?"

Et puis, à force de m'interroger, de me questionner, d'être honnête envers moi-même, force m'a été d'admettre que non, que tout cela ne m'intéressait pas, ou à peine, en tout cas, pas pour être une passion, pas même un germe de passion. Force m'a été d'admettre que mes intérêts étaient vraiment ailleurs et que ma personnalité solitaire, rêveuse, instable, distraite et à la recherche d' un idéal concordait davantage avec l'art.

J'ai beau vouloir être comme tout le monde, vouloir m'y intégrer, vouloir agir comme lui, penser comme lui, ça ne fonctionne pas. Il n'y a rien à faire.

C'est vraiment une passion pour moi. Lire et écrire passent avant tout. Même (et j'ai honte de l'écrire) avant mon fils ! Je ne fais que penser aux moments de sommeil de celui-ci, pendant lesquels je pourrai m'imprégner, aller à la découverte des mots, m'en imbiber, m'en entourer, m'enrouler avec... m'en réconforter, quoi !

Car grâce aux mots, je retrouve mon équilibre. Avec eux, je peux extirper toute la douleur, la folie et l'extase qui m'habitent, qui me rongent à l'intérieur et les sortir de mon être pour les déposer, tout en douceur, avec amour, même, sur le papier. Après, enfin, je peux respirer librement, l'air passe mieux, je suis plus détendue, plus sereine.

Plus le temps passe et plus j'ai l'intime conviction d'avoir une vocation : celle d'auteur. Mais j'ai tellement peur des regards, des jugements qui se porteraient sur moi si je le disais, mais aussi, des échecs (car j'en ai eus tellement!), que je n'ose m'aventurer plus avant dans cette passion qui est la mienne.

Cette dernière arrive bien avant l'intérêt que je porte à mon chum et mon enfant, dans la liste de mes priorités, ce qui n'est pas peu dire ! Comment expliquer cela à mon homme, à mes parents, à mes amis ??? J'ai peine à me l'expliquer moi-même.

Le soir venu, quand le soleil se couche derrière la ville pour faire place à l'ombre de la nuit, au lieu de courir dans les bras de mon homme, je coure ouvrir un livre. Si les écrits avaient des bras, comme je m'y sentirais bien !

Sûrement que cette passion coure à ma perte : la perte de ma vie intime, de ma vie de famille. Mais je m'en fiche : c'est la seule chose qui ne m'est jamais déçue, laissée de côté, laissée tomber. J'aime mieux me retrouver seule mais passionnée qu'entourée mais éteinte ! Hélas ! combien de gens préfèrent cette dernière situation : elle est tellement plus rassurante !

Le problème est que si être auteur est vraiment ma vocation, c'en est aussi une totalement risquée, en plus d'être dévalorisée par la société et plus particulièrement, par mon entourage. En effet, bien des membres de ma famille n'en ont que faire des écrivains, qu'ils considèrent comme des pelleteurs de nuages qui ne foutent rien et donc, qui sont sans intérêt. Pourtant, dans un numéro du magazine L'Actualité, on y mentionnait que bon nombre des technologies qui font partie de notre vie ont d'abord été pensées par des écrivains de science-fiction. Alors les écrivains sont inutiles, vraiment ?

Combien de fois, aussi, mon entourage m'a-t-il poussé, et me pousse encore, par des moyens détournés, à me trouver un "vrai" travail, autrement dit, un statut de salariée pour une entreprise X dans laquelle il y a une hiérarchie et des fonctions bien précises données par un supérieur, à un taux horaire enviable et dont la réputation n'est plus à faire ? Comme j'ai dû les décevoir, tous ces gens qui m'entourent (en fait il y en a peu), moi qui, plus souvent qu'autrement, ai occupé le statut précaire et très peu enviable de "pigiste", à faire quelque besogne douteuse à des tarifs plus que dérisoires ! Pour eux, cela est synonyme d'une totale immaturité dont il faudrait bien que je me départisse un jour !

Mais peut-on vraiment passer outre une vocation et la sortir d'une personne pour en faire un être que la plupart considèrent comme "normal" ? Que doit faire cette même personne quand, au beau milieu d'une activité routinière, telle le ménage ou le lavage, elle est assaillie par un sujet, une phrase, une idée ? Quand elle en est tellement absorbée qu'elle en oublie de manger et de se laver ? De porter attention à chum et enfant(s) ? Quand l'envie de lire et d'écrire est tellement forte qu'elle est heureuse seulement quand elle peut le faire ? Ne devrait-elle pas se lancer à fond dans cette vocation, à ses risques et périls, sans savoir où cela la conduira mais qui, elle en est sûr, la rendra infiniment heureuse ?