jeudi 22 mars 2018

Plus ça change, plus c'est pareil

C'était une belle journée du mois de mars. Le soleil se faisait plus fort, le ciel plus bleu, la neige commençait à fondre dans les rues et les oiseaux s'étaient mis à chanter, promesse d'un printemps qui tarde à venir.

À l'approche du printemps, comme tous les animaux, je me réveille d'un long sommeil. Mes sens s'aiguisent, mon coeur s'échauffe et j'ai envie d'avaler l'air à pleins poumons.

Je décide donc de me rendre en ville à pied. Mon sac bien en place sur mon épaule, la tête haute et le sourire aux lèvres, je marche d'un bon pas, admirant les beautés de la nature qui s'éveille autour de moi. Les gens me semblent plus souriants, des éclats et des rires me parviennent, les oiseaux gazouillent dans les arbres, la glace se retire lentement du fleuve... Ah que j'ai hâte que le printemps s'installe ! Finis les tuques, les mitaines et les foulards, finies les soutes qui prennent une éternité à mettre, finies les trois couches de vêtements pour ne pas avoir froid ! Et bonjour, les vestes en jean ou en cuir, les espadrilles qui foulent le gazon (et, parfois, il faut bien l'avouer, les flaques de boue), les fenêtres qui s'ouvrent, le linge qui se balance sur les cordes ! Bonjour les enfants qui jouent dans les parcs, les ados qui longent les rampes avec leur planche à roulette ou les motos qui pétaradent dans les rues ! Bonjour les terrasses bondées, les journées qui s'étirent et les jupes et t-shirts !

J'en étais là de mes réflexions, traversant les rues et les viaducs en saluant les gens, m'émerveillant de ce changement de saison, quand j'arrive enfin à destination. Je file aux toilettes me changer et qu'est-ce que je vois ? Là, sur mon pantalon doublé, en plein milieu de mon derrière, se trouve un trou d'environ 5 centimètres de long qui semble vouloir prendre de l'expansion. Non ! Je n'ai pas traversé toute la ville et vu tous ces gens avec cette béance sur mon derrière !

*
Ça me fait penser à cette autre fois, cette semaine-là, où j'ai vu la travailleuse sociale de mon fils (vous devez bien vous douter qu'avec une mère TDAH, la progéniture en garde des séquelles!). Elle me demande si j'ai fait mes devoirs (des trucs que je dois mettre en place pour que l'éducation de Will s'améliore). Et là, je la regarde, les yeux vides, la bouche ouverte, et lui demande :

- Quels devoirs ?
- Vous ne vous rappelez pas ?
- Euh... non.

Plus ça change, plus c'est pareil !


samedi 13 janvier 2018

Et si j'étais surdouée ?



Je n'y avais jamais pensé auparavant. Je ne m'étais même jamais posé la question : et si j'étais une surdouée, une zèbre ou une HP (haut potentiel) ? À l'école, mes résultats scolaires variaient considérablement. D'un cours à l'autre, d'un prof à l'autre, d'une année à l'autre. De sorte que je pouvais avoir 95% dans certaines matières, mais atteindre à peine la note de passage dans d'autres. Lors de sports d'équipe, je ne comprenais pas les consignes. Quand quelqu'un faisait une blague, je ne la saisissais pas. Ou si je la saisissais, je ne comprenais pas pourquoi les gens riaient. J'avais de la difficulté à accomplir des tâches simples mais en même temps, je n'avais pas de mal à philosopher ou à élaborer des théories sur l'origine de la vie. Tout au plus, je m'étais dit que j'étais intelligente. Et au pire, une imbécile. Comment en serait-il autrement quand vous avez passé votre vie à vous sentir différente des autres, à vous sentir décalée par rapport à eux, à vous faire regarder d'une manière étrange ?

Mais récemment, je suis tombée sur une émission qui m'a fait douter:

https://www.youtube.com/watch?v=DRb-Ye63WoY

Mais ce qui m'a vraiment, mais vraiment fait douter sur la question sont les vidéos d'une Psy à la Maison (spécialisée en douance et perversion narcissique), en particulier celle-ci :

https://www.youtube.com/watch?v=j5ynQL6oxMo

Moi qui croyais que ce n'était qu'une question de QI, je m'étais royalement fourvoyée. Plus qu'être intelligent, être surdoué est un état d'être, une manière de penser, de ressentir et de comprendre le monde. Pour plus d'info sur la douance :

http://www.tdahmonteregie.com/services-enfant-a-adulte/douance

Me suis alors remémorée mon enfance, pendant laquelle je préférais la compagnie des adultes à celle des enfants parce que je les trouvais plus intéressants, mon ennui à l'école, parce que j'avais tout de suite compris une notion que mon professeur passait 30 minutes à expliquer. Mon penchant pour la création d'histoires plutôt que les jeux avec les autres. Mon imagination très fertile et mon riche monde intérieur. Mes multiples questions existentielles (que je me pose toujours d'ailleurs) et les commentaires de mes enseignants : "elle est distraite mais intelligente", "elle est très curieuse, très chercheuse"... L'impression de pas être comprise ni acceptée, d'être en décalage par rapport aux jeunes de mon âge. D'être capable de lire les gens et de les percer à jour. Ma trop grande honnêteté et mon incapacité à supporter l'hypocrisie et l'injustice. Mon manque d'habiletés sociales et mes difficultés à gérer mes émotions lorsqu'elles étaient trop fortes. Mon besoin de stimulation, sinon, je déprimais, faisais le bouffon ou semais la pagaille... Mon immense besoin de liberté et de créer, mon cerveau en constante ébullition, ma capacité à voir hors du cadre et l'ensemble d'une situation... Mais en même temps, aussi, mon perfectionnisme et mon très grand besoin de solitude... Mon impossibilité à entrer dans un moule, quel qu'il soit, et à comprendre et à suivre les codes sociaux...

Selon ce que j'ai lu, quelqu'un qui ne réussit pas bien à l'école peut être surdoué. Quelqu'un qui est dyslexique ou dyspraxique aussi. Quelqu'un qui a des problèmes de comportement également. Car l'école a été conçue dans un seul et même moule, qui ne convient pas nécessairement à tout le monde, encore moins à des gens dont le cerveau fonctionne différemment comme celui des surdoués... qui voient tout de suite que l'école, eh bien, ça ne sert pas dans la vie... Du moins, pas vraiment.

L'école devrait tenir compte de ces différences, et l'adapter selon les profils.

On dit d'ailleurs que douance et TDAH sont intimement liés, même si les scientifiques ne comprennent pas encore vraiment pourquoi...

La question que je me pose est donc : suis-je surdouée ? Et j'aime à croire que oui. J'aime à croire, non pas que je sois plus intelligente que les autres, mais que je vois, ressens et comprends le monde d'une toute autre manière, une manière qui m'est propre, et que même si cette manière dérange les gens eh bien, c'est la mienne, c'est celle qui me définit, qui définit qui je suis, et j'ai envie de l'accepter. Oui, j'ai envie de m'accepter comme je suis, avec mes différences de pensée, de perception et de réaction. Avec ma différence de voir le monde.

Pour 2018, c'est ce que je me souhaite :  m'accepter comme je suis. Et c'est ce que je vous souhaite également.

Et je crois que les spécialistes devraient faire davantage de recherche sur le sujet car si je me pose cette question, c'est que d'autres personnes, et en particulier les adultes TDAH, doivent aussi se la poser...


mardi 9 mai 2017

Quelle mal élevée je fais !



Parfois, la distraction peut nous faire passer pour une personne mal élevée.

Prenez la semaine passée, par exemple.

Je vais au centre commercial pour prendre rendez-vous au salon de coiffure et j'en obtiens un pour 10h30 (il est 10h alors c'est plutôt pas mal).

En attendant, je vais me chercher un café dans mon casse-croûte préféré. Je vais m'assoir à l'une des tables placées à côté, et j'aperçois le préposé au comptoir assis à quelques tables de moi, en face, le journal ouvert devant lui. Je farfouille dans mon sac à main... pour réaliser que je n'ai rien à lire !!! Et il me reste une demi-heure à attendre ! Au secours ! Je suis là, mon gobelet de café bien chaud entre les mains, assise sur le bout de mon banc (je m'assois toujours sur le bout, ne me demandez pas pourquoi, peut-être pour pouvoir partir plus vite), en train d'observer les gens qui circulent autour de moi (un passe-temps que j'adore et qui me permet de tirer la matière de mes prochaines histoires puisque j'ai toujours plein d'idées d'histoires en tête). Une minute, ça fait. Deux, passe encore. Mais au bout de cinq, je suis carrément sur le bord de la crise de nerfs (je sais, j'ai un fichu caractère) !

Oh ! développement ! Le gars au journal se lève ! « Il retourne sûrement travailler », que je me dis. Alors j'en profite pour lui lancer, en pointant le journal devant lui :

- As-tu fini ?
- Non, me répond t-il sérieusement en secouant la tête. Je reviens.
- OK.

En effet, quelques secondes plus tard, il réapparaît.

Après ce qui me paraît une éternité à observer les faits et gestes de tout le monde, je le vois se relever. Nos regards se croisent et il me dit, journal en main :

- Tu le veux ?

Si je le veux ?!!! Si je le veux ?!!! C'est comme si je venais de recevoir une demande en mariage !

- Merci, que je lui dis en souriant.
- De rien.

Je l'ouvre à la page des jeux et j'entreprends les mots débrouillés (j'ai toujours besoin de me stimuler le cerveau).

Ce n'est pas la première fois que je vois le préposé. En fait, quand je vais à son casse-croûte, c'est souvent lui qui me sert. Plein de charme et sûr de lui, il a le don de me mettre à l'aise et a toujours un mot gentil.

C'est pourquoi, lorsque je me lève et m'apprête à quitter l'aire de restauration, quelques minutes plus tard, je suis surprise par son ton sec et son air sévère quand il s'amène vers moi :

- Tu me redonnes le journal ?

Je constate que ce dernier repose sur la table, ouvert à la page des jeux, que j'ai partiellement entachée avec l'encre de mon stylo :

- Ah oui, t'as juste à le prendre, que je lui réponds distraitement en m'en allant.
- Ben oui, c'est ça, que je l'entends marmonner entre ses dents.

 « Mais qu'est-ce qui lui prend, aujourd'hui ? que je pense. Il est donc ben bête ! »

Ce n'est qu'une fois rendue au salon de coiffure, en me remémorant les événements, que je réalise ma double erreur : non seulement j'ai écrit dans son journal, mais j'étais aussi sur le point de partir sans le lui remettre !

Mais quelle mal élevée je fais !

mercredi 1 mars 2017

Avoir l'air stupide... même sur un bateau !

On peut avoir l'air stupide partout... même sur un bateau !

Prenez hier, par exemple.

Je reviens de Québec et je monte sur le traversier pour me rendre à Lévis. Comme le bateau part à toutes les demi-heures, je coure dans les escaliers pour ne pas le manquer. Encore beau que je ne me sois pas enfarger dans les marches !

Une fois rendue dans le couloir qui mène au guichet (vous savez, celui où il y a un homme bête et grisonnant assis derrière un comptoir vitré), je me dirige vers les deux portes coulissantes... fermées. Je reste là, immobile, à les fixer pendant plusieurs secondes (je m'imagine sûrement qu'elles finiront par s'ouvrir par la seule force de ma pensée...).

- Voyons ! Pourquoi elles ne s'ouvrent pas ! que je grogne entre mes dents. La panique est en train de me gagner : et si le bateau avait cessé ses activités pour la soirée ? Après tout, il est 11h du soir !

Je lève la tête et croise le regard de l'homme derrière le comptoir, qui me regarde en secouant et en se grattant la tête.

« Mais qu'est-ce qu'il a à me regarder de même ! » que je me demande, agacée.

C'est alors que je remarque un écriteau fixé sur les portes : « Réservé aux sorties seulement ». Je ne sais pas pourquoi mais je pense : « ben oui, c'est ça, je sors de la traverse. Alors pourquoi elles ne s'ouvrent pas ?  ».

Et là, dans un éclair de lucidité, je viens de comprendre : ces portes sont destinées aux gens qui sortent du bateau ! Pas à ceux qui y embarquent !

Je sors de ma torpeur et coure vers l'homme derrière le comptoir, honteuse. Il pouvait bien secouer la tête en se la grattant ! Quelle nouille je fais !

Mais ma stupidité ne s'arrête pas là ! Oh que non !

Une fois sur le bateau, j'entre à l'abri et vais me poster à une fenêtre pour admirer la magnifique vue qu'offre la rive de Québec le soir. Les dizaines de lumières, les panneaux lumineux et surtout, le château Frontenac, m'hypnotisent. Puis, mes yeux se posent sur les blocs de glaces de différentes formes et grosseurs qui tapissent le fleuve que le brise-glace a laissés dans son sillage.
« Comme c'est beau ! que je me dis. C'est la première fois que je prends le bateau un soir d'hiver et c'est tout simplement magique ! Encore plus que l'été ! »

Tout à coup, un gros « boum » retentit mais l'eau continue de tourbillonner à mes pieds et les morceaux de glace, à dériver. La peur me prend : et si on avait percuté un iceberg, comme dans Titanic ? L'eau doit être d'un froid sibérien là-dessous ! Comment vais-je tenir le coup aussi longtemps que Jack et Rose ? (Je me souviens encore des noms des personnages principaux, signe que ce film m'a marqué. D'ailleurs, c'était vraiment un bon film très bien fait, avec une belle histoire d'amour comme je les aime entre deux êtres que tout sépare mais qui finissent par se retrouver dans l'éternité et qui reproduit efficacement l'Angleterre du début du 20e siècle avec ses différentes classes sociales et... Mais attendez ! Je suis en train de faire une critique de cinéma, là! Alors revenons à nos moutons !) Mon imagination s'emballe, donc, comme toutes les fois où j'ai peur. Je m'imagine en train d'agripper un iceberg et de m'y hisser, attendre qu'on vienne me secourir, bleue et tremblante, tandis que le sang se retire de mes mains et de mes pieds. Finalement, je meurs de froid et glisse vers le fond, où un navire retrouvera mon corps des années plus tard. Bon, je sais, c'est morbide, mais c'est le genre de pensées qui me traversent parfois l'esprit...

Je regarde autour de moi : pas de cris de panique, pas de gens qui se ruent à l'extérieur à la recherche de canots de sauvetage, c'est bon signe. J'en vois même debout sur le pont, qui semblent admirer la vue. Bah, ça ne doit pas être si grave que ça.

Soudain, la porte s'ouvre. Ça y est, c'est le capitaine qui vient m'avertir qu'il faut embarquer dans les canots ou m'ordonner de sauter à l'eau parce que son bateau a percuté un obstacle et que l'eau s'engouffre. Je tourne la tête : mais non, ce n'est que le concierge qui entre avec sa moppe et son seau d'eau pour laver le plancher.

Il me regarde d'un air curieux. « Ben voyons ! Qu'est-ce qu'ils ont tous à me dévisager comme si j'étais une extra-terrestre ? »

Je baisse la tête vers les eaux et les voient encore remuer : on ne doit pas être arrivé. Je reporte mon attention sur la rive opposée, avec ses magnificences. Parfois, je croise le regard du concierge dans la vitre, qui s'affaire derrière moi. Décidément, il a l'air de me trouver bizarre !

Des gens entrent dans l'abri. Des nouveaux. Que je n'ai pas vus.

Encore une fois, je suis frappée par un éclair : et si on était arrivé ? Et si le tourbillonnement de l'eau et la dérive des glaces n'étaient pas un signe de mouvement ?

Je lève la tête, paniquée, et me rue vers la sortie. Je presse le bouton qui fait ouvrir la porte et je vois la passerelle déployée devant moi. Oh mon Dieu ! Le bateau est arrêté ! Mais depuis combien de temps ?


dimanche 8 janvier 2017

J'ai oublié de prendre mon Nest Café ce matin...



Même si je gère de mieux en mieux mon déficit de l'attention, je suis encore - hélas ! - distraite. Et quand ça m'arrive en public, j'en suis toute honteuse. C'est pourquoi, pour dédramatiser un peu, j'ai  trouvé une phrase passe-partout qui me fait paraître un peu moins tête en l'air :
« j'ai oublié de prendre mon Nest Café ce matin».

Tenez, prenez l'autre jour, par exemple.

Je vais au Subway, pour ne pas le nommer (ben quoi, c'est dans mes moyens alors pourquoi ne pas y aller ?), et je commande un café (ah ! ce cher café ! Que deviendrais-je sans lui ?). La préposée me dit le prix, (même si j'y vais régulièrement, je l'oublie toujours, ce maudit prix! Alors elle doit me le rappeler sans cesse) et je paie. Mais évidemment, c'est après avoir payé que je me rends compte que j'ai une carte-café toute poinçonnée, ce qui fait que si j'avais pensé à cette maudite carte plus tôt, le café ne m'aurait rien coûté (j'essaie toujours d'économiser le plus possible, surtout que je ne roule par sur l'or). Alors je la sors et dis :

- Oups ! Je viens de me rendre compte que j'ai une carte toute poinçonnée.
- C'est pas grave, vous n'aurez qu'à l'utiliser la prochaine fois (pourquoi ne me rembourse-t-elle pas et ne me donne-t-elle pas mon maudit café gratuit tout de suite ? Je me suis toujours posée la question sans jamais avoir eu le guts de la lui poser).
- OK, que je réponds, embarrassée.

Je remets ma carte à moitié utilisée dans mon portefeuille, prends mon verre à café et vais le remplir.

- Heu... vous avez oublié de reprendre votre carte (comprendre la toute poinçonnée)

Je sursaute et la regarde, les yeux vides.

- Vous en aurez besoin la prochaine fois, pour avoir votre café gratuit, m'explique-t-elle, comme à une enfant.

- Ah... oui... Désolée... j'ai oublié de prendre mon Nest Café ce matin...

Elle sourit. 

***

Dans l'après-midi, je vais porter un formulaire au bureau de poste. Pour le gouvernement. C'est urgent. (Tout ce que le gouvernement m'envoie est urgent. Ils me l'ont envoyé le 2 pour que je le leur renvoie avant le 6. Wow. En plein dans le temps du jour de l'An. Et si j'avais eu plein de partys durant cette période, hein ? Je l'aurais oublié ? Et après, ils m'auraient harcelé ? Pas fou, comme idée, hein ?  Heureusement, j'ai eu une période des Fêtes tranquille.) Dès que je l'avais reçu, je l'avais rempli et y avais inscrit mon nom et mon adresse sur les lignes. Et comme il y avait une forme carrée pour le timbre et que je n'en avais pas en ma possession (faut dire que je n'ai pas regardé mais bon, ça, c'est une autre histoire...), direction, bureau de poste.

Une fois là-bas, une femme à l'air de bœuf m'accueille. Bon ! Ça commence bien ! Pis là, elle regarde l'enveloppe que j'ai posée sur le comptoir. Elle lève la tête et dit :

- Vous n'avez pas mis l'adresse de destination au centre.
- Je sais, mais il y avait seulement un encadré transparent avec l'enveloppe de retour...

Elle soupire bruyamment, ouvre l'enveloppe d'une main brusque, tourne le formulaire dans tous les sens, et constate la même chose que moi.

- On va mettre une étiquette et écrire l'adresse dessus.
- OK.
- Et là, vous avez inscrit l'adresse du destinataire, alors que c'est votre propre adresse qui devrait y être.

Elle me dévisage d'un air bizarre.

Je regarde les lignes que j'avais remplies, dans le coin supérieur gauche. Je réalise, en effet, qu'elles contiennent non pas ma propre adresse, comme c'est l'usage, mais celle de l'organisme gouvernemental. Mais pourquoi j'ai fait ça ?!

Je lève la tête et dis :

- Oups ! J'ai oublié de prendre mon Nest Café ce matin.

Comme la préposée du Subway, elle sourit.

Ouf ! Une chance que je l'ai, cette phrase-là !

mardi 20 décembre 2016

Miss Organisation


Je sais, j'ai encore l'air d'être désorganisée, mais quand je regarde en arrière, je réalise tout le chemin parcouru. En fait, on pourrait maintenant m'appeler Miss Organisation.

En effet, quand je reçois du courrier, je m'empresse de le placer au bon endroit. Je jette le vieux et le remplace par le nouveau. Je paie immédiatement mes comptes. Je signe tous les formulaires (et Dieu sait qu'il y en a lorsqu'on est parent d'un enfant d'âge scolaire ! Signe pour tel travail, pour telle évaluation, pour telle permission de sortie, pour la participation à tel événement, pour qu'il puisse respirer, péter, se gratter, s'habiller... ça ne finit plus!) Je fais des piles pour les vêtements qui ne font plus : une pour la friperie et une autre pour la poubelle.

J'inscris au calendrier et un peu partout dans la maison les multiples rendez-vous que mon rôle de parent amène (médecin, dentiste, psychologue, coiffeuse, parent-prof, vaccination... ) en plus des miens : médecin, dentiste, coiffeuse, garage-entretien, garage-réparations, garage-pose de pneus, garage-achat (maudit que ça coûte cher, un char!), entrevue d'embauche, rendez-vous galants (quoique dans mon cas, c'est plutôt rare...), psychologue/travailleur social/thérapeute/psychothérapeute/psychanalyste (appelez-le comme vous voulez, bref, il faut bien ventiler), sans compter les nombreuses choses à faire : épicerie, achat de vêtements, d'articles scolaires, de médicaments, spectacle de musique de Will, passer du temps avec Will, finir mon livre, retour de livre, avancer mon blogue, apprendre mon anglais, transferts, paiements de factures et dépôts bancaires... Je note absolument tout !

Je pars 30 minutes d'avance pour être sûre d'arriver à l'heure à mes rendez-vous (parce que je sais qu'en chemin, je vais me pencher pour ramasser toutes les choses qui traînent et que je vois du coin de l'œil, que je vais arrêter dans le miroir pour me recoiffer ou me remaquiller ou aux toilettes pour la énième fois (je ne sais pas pourquoi j'y vais quand je viens d'y aller mais bon, c'est peut-être un signe d'Alzheimer...).

Je jette les choses au fur et à mesure : reçus, papiers de bonbon, mouchoirs, brouillons, courriels (surtout ceux qui viennent d'Afrique et qui m'annoncent qu'une vieille tante vient de me léguer 1 000 000 $ même si je n'ai AUCUNE vieille tante qui vit en Afrique) indésirables. Je m'abonne le moins possible aux publications car quand je commence ça, je suis ensuite bombardée d'une tonne de pubs : sites de rencontres, Viagra (même si je n'en ai pas besoin. Premièrement, je ne suis pas un homme, comme vous devez vous en douter, et deuxièmement, c'est la calme plat de ce côté-là), Nasonex, vêtements, abris d'auto, antiseptiques, organismes de charité, sirops, vestons pour hommes (ils doivent me prendre pour l'autre sexe), placements bancaires, articles de cuisine (même si je ne cuisine jamais. Non, moi, je ne jure que par le préparé d'avance même si ce n'est pas bon pour la santé mais j'essaie de m'améliorer), échantillons de dentifrices, de parfums (même si je ne me parfume jamais, je préfère la fragrance Senteur Naturelle)...

Et j'ai pour règle d'or de TOUJOURS, TOUJOURS, TOUJOURS mettre mes choses bien en vue à la même place à chaque jour. Si je ne suis pas cette règle, je suis FOUTUE.

Et mon nouveau mantra (je ne sais pas pourquoi je dis « nouveau » puisque je n'en ai jamais eu...) : CE QUE JE NE VOIS PAS N'EXISTE PAS.

lundi 19 décembre 2016

Mais où j'ai mis mon ticket ?!!!

Bien que je me sois beaucoup améliorée dans l'art de gérer la paperasse, j'ai encore du chemin à faire.

Prenez ce matin, par exemple.

Je vais à l'hôpital avec Will parce que sa toux n'arrête pas d'empirer, malgré les multiples antibiotiques, pompes et eaux salines que je lui injecte depuis 1 mois et demie. Je n'adhère pas à la théorie des médecins, comme quoi ce n'est qu'un vieux rhume qu'il traîne. Moi, dans ma tête, un rhume, ça dure deux semaines. Si ça traîne, c'est parce qu'il y a anguille sous roche. Et ce matin, je suis vraiment déterminée à l'attraper, cette maudite anguille !

Je vais donc à l'hôpital avec sacoche, DS, jeux et bouteille d'eau, mes indispensables.

 Arrivée dans le stationnement, j'appuie sur le fameux bouton de la barrière, vous savez, celui qui est toujours trop loin pour notre bras trop court et qui nous oblige à sortir de la voiture pour réussir à appuyer dessus. Ce jour-là, la chance doit être de mon bord parce que je réussis à l'atteindre du premier coup. Youpi ! Je mets mon ticket dans le porte-bouteille et vais me stationner. Puis, je le fourre dans une poche de mon jeans et m'assure que j'ai mes indispensables (incluant Will, bien sûr!) avant de me diriger vers l'accueil.

Rendue dans l'entrée, j'apprends qu'en plus du traditionnel lavage des mains et du masque qu'il faut porter, il faut maintenant passer le dessous de nos bottes sur une machine nettoyante. La belle affaire! Moi et Will, on tente de garder notre équilibre tout en prenant la pose du pélican...

Ensuite, on entre dans l'hôpital et j'appuie sur un écran pour avoir mon billet de triage. On va s'asseoir et on enlève sacoche, tuques, manteaux, cache-cou, mitaines (ah ! les joies de l'hiver!), je sors le DS du sac et la bouteille d'eau de l'autre. Mais après seulement quelques secondes, on est appelé. Je ramasse en vitesse sacoche, tuques, manteaux, cache-cou, mitaines, DS et bouteille d'eau, les enfonce dans les manches des manteaux et on file vers la salle de triage. Le triage, c'est toujours rapide, que je dis à Will. C'est après que ça se corse... 

On n'a pas sitôt mis les pieds dans la salle que l'infirmière me demande notre billet et les cartes d'hôpital et d'assurance-maladie de Will. J'accroche nos manteaux sur le crochet de la porte, derrière moi, pose le sac à bouteille d'eau sur la table. Je sens son regard sur moi et me débats avec ma sacoche pour en extirper cartes et billet. Envoye! Grouille ! que je me dis à moi-même. La madame attend après toi ! Après plusieurs secondes de farfouillage, qui me semblent interminables, je les lui tends.

Puis, elle me demande ce qu'il se passe, prend la pression artérielle de Will, le fait monter sur une balance et lui insère un thermomètre dans le derrière. Il fait 38,2 de fièvre. (Moi, j'ai arrêté de la prendre parce que quand je le fais, le nombre affiché n'est jamais le même : 36,6, 37,1, 38,9, et de nouveau 36,6... C'est à devenir dingue ! Je ne dois pas avoir le tour...) Puis, elle me pose les sempiternelles questions: Depuis combien de temps votre fils a ces symptômes ? A-t-il des allergies? A-t-il déjà pris des pompes ? Y a-t-il certains médicaments qu'il ne peut pas tolérer? Très bien, allez vous inscrire et assoyez-vous dans la salle d'attente. 

Je ramasse mes affaires (j'en ai tellement que j'ai l'impression de transporter la maison au complet), on va au secrétariat pour s'inscrire et on va s'asseoir. J'empile ma sacoche et nos manteaux à côté de moi, ressors la bouteille d'eau et le DS et les tends à Will. Il les ouvre et se met à jouer. À ma grande surprise, le médecin nous appelle au bout de quelques minutes. Il faut dire qu'en ce lundi matin, il n'y a pas grand-monde... On remballe sacoche, DS, manteaux et bouteille d'eau. Direction : bureau du médecin.

On entre et je lui résume les six dernières semaines. Il écoute la respiration de Will au stéthoscope, examine sa bouche et ses oreilles et décide de lui faire passer une radiographie des poumons et des bronches. C'est pas trop tôt, que je pense. Il me tend une feuille bleue.

On va au département d'imagerie médicale, je leur remets la feuille et attends, Will pleurant à chaudes larmes à mes côtés. C'est que le médecin est allé un peu fort en examinant ses oreilles... Là encore, on ne nous fait pas attendre longtemps, ça doit être mon jour de chance, tout semble bien aller... Il passe sa radio et on va avertir la secrétaire. Elle nous dit de retourner nous asseoir.

Je remets ma sacoche, les manteaux et la bouteille d'eau à côté de moi, sors le DS et Will se re-remet à jouer. Puis, le médecin nous appelle encore une fois. On remballe sacoche, manteaux, DS et bouteille d'eau et on entre dans son bureau. Ses poumons sont beaux, mais il a une hypertrophie des végétaux. Traduction : va falloir lui enlever les amygdales. Il va communiquer avec un spécialiste et on devra attendre qu'il nous appelle... après les Fêtes. Il me donne une prescription et on ressort du bureau.

On retourne dans la salle d'attente, on s'habille et j'enfonce ma main dans la poche de mon jeans. Ouf, mon billet est encore là. On se dirige vers le bidule de paiement, j'insère mon billet : 4,75$. Je donne 20 $, prends le change, presse sur un bouton pour avoir mon reçu et le mets dans une poche de mon manteau. On va dans l'entrée et Will me dit qu'il faut se relaver les mains. Je lis le panneau : Veuillez vous laver les mains en arrivant et en quittant. Pour avoir l'air d'une bonne mère, j'obéis. Puis, on sort dans le stationnement, on va vers l'auto au pas de course (il doit bien faire - 30 dehors, vive le Québec !) et on s'y engouffre.

Je démarre, retourne vers la barrière et sors le billet que j'ai dans ma poche. Je l'insère. La barrière ne s'ouvre pas. Quoi ?! Mais qu'est-ce qu' il se passe !  Je le réinsère. Même chose. Évidemment, c'est à ce moment-là qu'une auto arrive derrière moi. Pour avoir la paix, je fais demi-tour et vais me stationner dans un coin.

- C'est le stationnement des médecins, fait remarquer Will.
- Je m'en fous.

C'est alors que je réalise que c'est mon reçu que j'avais tenté de faire entrer dans la fente de la machine à barrière.

- Mais où est-ce que j'ai mis mon maudit ticket ? Bon, je vais aller voir en-dedans. Bouge pas, je reviens tout de suite. 

J'entre à nouveau dans l'hôpital en évitant de regarder les gens (j'ai pas envie qu'ils me reconnaissent et qu'ils se demandent pourquoi je suis revenue) et me dirige vers la première employée que je vois, lunettes embuées.

- J'ai pas mon ticket pour sortir du stationnement. Qu'est-ce que je fais ?
- Allez voir l'agent de sécurité, qu'elle me répond avec un air bête.

Je fonce vers l'agent et lui explique ma situation. Il se retourne, prend un objet sur le bord de son bureau et me le tend. Un billet. Le mien.

- Oh, merci ! 

Un peu plus et je l'embrasse !

Je me rue vers la sortie, cours dans le stationnement (pourvu que l'auto ne se soit pas fait remorquer avec Will dedans ou qu'il ait décidé d'en sortir ou qu'un véhicule l'ait percuté!) et pousse un soupir de soulagement en voyant que mon auto est toujours là, intacte, et Will avec.

- Yeah ! Je l'ai ! que je crie d'un ton victorieux en embarquant et en brandissant le précieux objet devant Will. Il me regarde d'un drôle d'air, je démarre et me dirige vers la barrière.

J'insère mon ticket dans la fente et... bonheur des bonheur ! Elle s'ouvre !